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Caucase 2 - Arménie - Mai 2019
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Au petit matin, passage de la frontière Géorgie - Arménie à Bagradashen. La région est bien montagneuse.

Visite de la forteresse d'Akhtala, construite au 10ème siècle. J'en profite pour parler rapidement de l'histoire de cette région. Laquelle commence tôt, durant le dernier millénaire avant JC, par un peuplement indo-européen ayant envahi la région - les Hittites. De nombreux petits royaumes se forment, souvent en guerre entre eux et avec les Assyriens. Ensuite la région est soumise par les Perses dont elle devient une province. Et dans les derniers siècles avant JC arrivent Alexandre le Grand puis les Romains. La suite est une succession de conquêtes et d'arrangements entre Occidentaux et Perses.

L'Arménie s'est convertie au christianisme vers 300 après JC, et l'alphabet arménien est créé vers l'an 400. Coincée entre Rome et les Perses, une monarchie s'installe (1er âge d'or), que vient bousculer l'invasion arabe vers 650. Retour à une certaine indépendance en 880, jusqu'à l'invasion Seldjoukide (des Turcs) après l'an 1000. Vers 1100 c'est un Géorgien, David le constructeur, qui libère les 2 pays. Second âge d'or pour l'Arménie, avec la reine Tamar, les Zakarian, que les Mongols puis Tamerlan (1400) stoppent à plusieurs reprises.

Après la chute de Byzance (1453) le pays est coincé entre les Perses chiites et les Turcs sunnites, et ils ne s'entendent guère. Finalement, après 2 siècles de conflits dévastateurs, les Russes mettent tout le monde d'accord en annexant plus ou moins Géorgie et Arménie. Je parlerai de la suite plus tard.
 

Ensuite, visite approfondie du groupe monastique de Haghpat, l'un des plus importants d'Arménie. L'activité du site a débuté par la construction de l'église de la Croix, vers la fin du 10ème siècle (on est dans le second âge d'or historique).

Le nartex, bien plus grand que l'église elle-même.

Il ne reste plus grand chose des fresques dont l'église était décorée à l'origine.
 

Comme pour d'autres ensembles monastiques, ce lieu servait non seulement d'église, mais également d'école, avec des bibliothèques, des chapelles, et tout ce qui était nécessaire à la vie courante des religieux et des étudiants.

Le campanile, 13ème siècle.

Le double arc de la voute du réfectoire.

Soirée et nuit à Haghpat, surplombant la profonde vallée du Debed.
 

Au matin, ciel gris, pluvieux. Tout paraît sombre au fond de cette vallée taillée par la rivière dans des roches volcaniques.

A l'époque soviétique, de nombreuses usines métallurgiques (mines de cuivre) s'étiraient le long du Debed.

La plupart de ces usines ont fermé avec la chute de l'URSS. Il reste les friches, les ruines, une impression d'abandon et de désolation.
 
 

Eglise d'Odzoun, l'une des plus anciennes en Arménie. Elle a été construite vers 580.

Malgré son ancienneté les architectes ont construit un édifice élevé, à 3 nefs et avec une galerie extérieure.
 

Petite grimpette sur un sentier boueux et glissant à souhait, pour monter au monastère de Kobayr.

Début 8ème siècle, Kobayr a été construit à flanc de falaise. Pour le moment, aucune restauration n'a été faite, et l'ensemble est relativement effondré.

Il reste de rares fresques.
 

Le coin paraît relativement déshérité.

En direction de Dilidjan pour y passer la nuit, arrêt à Fioletovo, village habité par les Molokans. Ce sont des orthodoxes d'origine russe, vivant en communauté plutôt fermée. Cela nous fait penser aux Mennonites.

Cette famille de Molokans accueille néanmoins des petits groupes, et est très ouverte aux discussions.
 

Vue de Dilidjan où nous passons une nuit.

Atelier cuisine pour ceux et celles qui ne sont pas fanatiques d'une marche boueuse.

C'est le gâteau arménien traditionnel, Gata. Très bon, on va en faire à la maison !

Pour les mêmes également, visite du monastère de Goshavan, du nom du lettré et juriste Gosh. Début de construction vers 1100 (2ème âge d'or) ; on y enseignait le droit, la théologie, l'histoire.
 

Le nartex.

C'est dimanche, il y a la messe.

Des belles voutes en double arc.

Et le fameux khatchkar dit "de la dentelle". On aura l'occasion d'y revenir, aux khatchkars.
 

Sur la route vers Sevan, de nombreux vendeurs de maïs.

On arrive au bord du lac Sevan. On dirait la plaine, mais c'est tout de même à 1900 m d'altitude.

Les touristes sont nombreux, sur le site du monastère de Sevanavank, construit au 10ème siècle.

D'autres "monuments" sont plus récents ! Krouchtchev ? Brejnev ? Quand même pas Gorbatchev ?
 

Vers le village de Noratous, où se trouve un cimetière réputé pour ses khatchkars.

Les premières tombes sont datées du 9ème siècle, et le cimetière est toujours utilisé. Quelques mémés vendent des bricoles et des jolis chaussons tricotés en laine bien colorée.

Les khatchkars sont l'équivalent des croix dans les campagnes françaises, le nom lui-même signifie "croix de pierre". Ils sont peut-être hérités de pierres dressées plus anciennes. Les pierres tombales montrent souvent le métier du défunt.

Soirée et nuit à Martouni, à l'extémité sud du lac de Sevan. C'est un gros bourg, à 2000 m d'altitude.
 

Passage du bus local.

Chaque maison a son grand jardin bien cultivé.

Devant chaque maison, des bouses sèchent pour le chauffage (le gaz n'est pas distribué partout).
 

Le cimetière est situé en haut du village et la vue sur les monts environnants est belle.

Balade de 2 heures sur ce vaste plateau aride.
 

En été il est peuplé de troupeaux nomades.

La route continue vers le sud, en direction de Yeghegnadzor (où nous gîtons) ; en-dessous du col de Selim (2400 m) on peut visiter l'ancien caravanserail d'Orbelian.

Daté du 14ème siècle, c'était un relais sur une des nombreuses routes de la soie.

L'intérieur est rustique, rien à voir avec les caravansérails d'Istanbul par exemple. En réalité, il fait très sombre dedans, j'ai monté la lumière pour y voir quelque chose.
 

Du côté de Yeghehnadzor, visite du monastère de Noravank (13ème siècle) installé au pied de falaises de tuf ocre.

L'apogée du monastère se situe dans les 14ème et 15ème siècles, soutenue par la famille Orbelian.

Une journée de randonnée, objectifs : le monastère de Tsakhats Kar et la forteresse de Smabataberd. Avant de grimper (rudement) sur la montagne, il faut remonter une longue vallée, et traverser quelques villages.
 

Vues de village ; des bouses sèchent partout, on marche sur une piste, les maisons ne sont pas luxueuses, beaucoup de personnes, principalement âgées, sont dans la rue (et nous regardent passer).

D'après moi ce sont des Lada. Ou des copies des anciennes Fiat, largement répandues dans l'Union soviétique.
 

Le monastère de Tsakhats Kar (10ème siècle).

Sur la crête du fond, à cheval entre 2 vallées, la forteresse du 10ème siècle de Smbataberd. Là aussi, la montée est rude.

Yeghehnadzor est un gros bourg tranquille, aux rues larges.

Il reste beaucoup de bâtiments de l'époque soviétique. Des camions, aussi.
 

Petits commerces et personnes qui vendent leur production locale.

Répétition d'un spectacle, probablement. Les gamines se donnaient à fond !

Départ vers la capitale, Erevan. La route longe la frontière : d'abord avec le Nakitchevan (enclave azerbaïdjanaise qui fait pendant au Haut Karabagh arménien au coeur de l'Azerbaïdjan). Tout au long de cette frontière sont installés des guérites et des postes militaires.
 

Mais il y a aussi des vignes.

En entrant dans la plaine d'Erevan, c'est la Turquie qu'on longe. Impossible de passer, il n'y a aucun poste frontière et la Turquie est interdite aux Arméniens. Déjà on aperçoit, à l'horizon, le mont Ararat, le Petit et le Grand.

La frontière n'est qu'à quelques kilomètres, le Mont Ararat à quelques dizaines de kilomètres, mais impossible aux Arméniens d'y aller, et pourtant c'est leur montagne sacrée, alors que par le passé leur pays s'étendait loin vers l'Anatolie maintenant entre les mains turques.

Le monastère de Khor Virap, du 17ème siècle. Encore un haut lieu de pèlerinage et de prises de clichés (au bord de la route, tous les bus s'arrêtent et nous sommes des dizaines à sortir les appareils photos). Mais avouez, cela vaut le coup d'oeil.
 

En se retournant : la plaine d'Erevan.

A une heure d'Erevan, le monastère de Ghégarde (13ème siècle).

La plupart des églises et chapelles sont directement creusées dans le basalte ; les ouvriers ont dû suer !
 

Si vous avez envie d'écouter un chant arménien, dans ce lieu-même : https://youtu.be/KHr3ydUFmPs

Pas très loin de Ghégarde se trouve le temple de Garni. C'est, paraît-il, le seul monument datant de l'ère pré-chrétienne resté en place en Arménie. Celui-ci a probablement été construit vers le 1er siècle après JC. Il fait partie d'un ensemble comprenant une forteresse et des thermes de facture romaine.
 

L'ensemble de Garni est construit sur l'éperon rocheux que l'on aperçoit au fond à droite, et surplombe une profonde vallée, la gorge de Garni. Dans le fond, une pisciculture.

Le chemin longeant la rivière Garni donne accès à d'imposants affleurements basaltiques sous forme d'orgues.

Le voyage a débuté dans la capitale de la Géorgie. Il se termine à Erevan, capitale arménienne (les Arméniens disent et écrivent Yerevan).

Mémorial du génocide de 1915, placé au sommet d'une colline en bordure de la ville. Je profite de cette photo pour terminer de parler, très sommairement, de l'histoire arménienne. Rappel : à partir du 16ème siècle et jusqu'à la fin du 19ème, le pays, beaucoup plus vaste qu'actuellement, se compose de 2 parties : l'Arménie occidentale, sous contrôle ottoman, et l'Arménie orientale, d'abord sous contrôle des Perses puis des Russes. Les Turcs, suite aux conflits avec les Russes, durcissent peu à peu leurs positions et commencent à réprimer les Arméniens. En 1908 le parti Jeunes-Turcs prend le pouvoir ; peu à peu l'idée de créer une "Grande Turquie" musulmane, avatar de l'Empire ottoman, prend place. Le drame se joue durant la Première guerre mondiale, quand les Turcs, alliés aux Allemands, sont défaits par les Russes. En 1915, les Jeunes-Turcs, en guise de vengeance, organisent le génocide des Arméniens vivant en Arménie occidentale.
 

Juste après la Première guerre mondiale, dans le cadre du partage de la région entre Grande Bretagne et France, l'indépendance d'une République d'Arménie est reconnue. Mais dès 1920 les Soviétiques incorporent les 3 pays (Arménie, Géorgie et Azerbaïdjan) dans l'URSS. La République socialiste soviétique d'Arménie durera jusqu'en 1991, date de l'indépendance.

Erevan n'est la capitale que depuis 1918 (plusieurs cités ont été capitale, au cours du temps). C'est une ville récente, mais l'architecte, Tamanian, a su s'écarter du lourdingue style soviétique. La Place de la République est le coeur de la ville.

Bon, dès qu'on s'éloigne du centre, l'architecture communiste resurgit.

L'opéra, à côté de la place de France.
 

La Cascade, lieu de promenade et d'exposition.

En Arménie, Charles Aznavour est un héros national, on le voit partout. Il est l’archétype de tous les Arméniens qui ont quitté leur pays, principalement au début du 20ème siècle. Cette diaspora est une importante source de devises. De nombreux monuments, immeubles et équipements, sont financés par ses membres.

On estime le nombre total d'Arméniens à une dizaine de millions, dont 7 millions vivent en diaspora. L'Arménie compte environ 3 millions d'habitants, dont 1 million réside dans la capitale. 1/3 des habitants, mais Erevan semble concentrer la quasi-totalité de la richesse du pays.

Tous les soirs, la place de la République est remplie de monde.
 

Et c'est ici que notre beau voyage se termine. Comme d'habitude, pour des renseignements, n'hésitez surtout pas ! ==> acschaeffer@laposte.net